Pourquoi Liverpool n'y arrive plus
Alors invaincu depuis avril 2017 à Anfield (défaite 1-2 contre Palace à l'époque), Liverpool s'est écroulé et a mis fin à son record d'invincibilité à domicile jeudi dernier contre Burnley en se faisant surprendre 0-1 contre le 17ème du championnat. Dans ces matches où les Reds prenaient souvent l'ascendant très vite sur leurs adversaires, les joueurs de Liverpool n'ont pas su concrétiser la moindre occasion jeudi et on subit un pénalty en fin de match, résonnant comme une punition à leur inefficacité. Cette défaite s'ajoute à une série noire de mauvais résultats qui touche le club depuis la fin du mois de décembre : depuis la démonstration de force à Crystal Palace en championnat (victoire 7-0), les Reds n'ont remporté qu'un match sur les sept derniers (victoire en coupe contre l'équipe jeune d'Aston Villa).
Qu'arrive-t-il aux mythiques champions d'Angleterre 2020 qui ont sur-dominée leur championnat la saison passée ? Qu'arrive-t-il à l'attaque de Liverpool qui n'a marqué qu'un seul but sur ses cinq dernières rencontres de Premier League (West Bromwitch, Newcastle, Southampton, Manchester United, Burnley) ?
Un contexte particulier, des blessures et des malades
Si le Covid-19 n'a pas empêché Liverpool de remporter le premier titre de Premier League de son histoire l'année passée (la Premier League naît en 1992 et a ''remplacé'' ce qu'était la Football League depuis 1888), il n'est en revanche pas très aimable avec le club de la Mersey depuis le début de saison et n'épargne ni les joueurs, ni les membres du staff. Sans supporters, les clubs anglais pâtissent dans un premier temps d'une absence mortelle de recettes liées à la billetterie, mais aussi de l'absence du 12ème homme qui aide à surmonter certains moments de doute ou qui encourage jusqu'à la dernière minute à sauver un point ou deux, voire même à pousser Origi à inscrire un quatrième but un soir de demi-finale de Ligue des Champions (clin d'oeil). Et les Reds savent très bien qu'avec son public en moins, la forteresse qu'est Anfield paraît tout d'un coup beaucoup moins impressionnante : avant la défaite contre Burnley, Liverpool avait failli perdre contre West Bromwitch et aurait pu se faire surprendre lors du nul 0-0 contre Man U il y a deux semaines. Certes l'absence de supporters touche tous les clubs anglais, mais le public de Liverpool est tellement important que son absence se fait ressentir, ne serait-ce que par l'absence de la foule qui fait résonner le You'll Never Walk Alone* dans tout le stade avant le coup d'envoi
*un article traite d'ailleurs de son histoire dans l'espace ''Nos articles''
Au delà de l'absence de supporters, les blessures de certains cadres de l'effectif expliquent certains résultats. Tout d'abord celle de la recrue estivale Diogo Jota qui est indisponible pour une durée indéterminée depuis le 9 décembre dernier. Arrivé en provenance des Wolves, l'attaquant portugais était tellement efficace qu'il avait remis en question la triplette offensive Mané-Firmino-Salah jusqu'alors incontestée : avec 9 buts en 9 apparitions, Jota avait fait l'exploit de prendre la place d'un Roberto Firmino dont l'efficacité offensive est encore perpétuellement remise en question. Avec Salah et Mané, le trio offensif que possédait Klopp avec Jota était d'une efficacité insolente. Mais malheureusement, depuis sa blessure en début décembre dernier, Jota n'a plus remis les pieds sur un terrain et l'attaque de Liverpool en subit les frais, on y reviendra plus tard.
En plus de l'attaquant portugais, deux autres cadres des Reds demeurent indisponibles. En effet, le capitaine et patron défensif Virgil Van Djik ne retrouvera plus les terrains avant avril prochain depuis sa rupture des ligaments croisés en octobre dernier, tandis que son compère défensif Joe Gomez est indisponible depuis le 11 novembre dernier à cause d'un problème de rotule qui le retiendra jusqu'à la saison prochaine. La charnière titulaire de ses deux dernières années qui a verrouillé la cage d'Alisson lors du titre de Ligue des Champions 2019 et du titre de Premier League 2020 se retrouve à l'infirmerie pour une très longue période, obligeant Jürgen Klopp a faire redescendre des milieux défensifs comme Fabinho et Henderson ou à compter sur des jeunes comme Rhys Williams. Mais ni des milieux rebaptisés défenseurs, ni des jeunes du centre de formation ne peuvent pallier à l'absence colossale des deux rocks défensifs que sont Van Djik et Gomez. Alors Liverpool encaisse des buts. « Mais cela ne devrait pas poser un problème avec la qualité offensive des trois de devant ? » me diriez vous, et bien si.
Un trio qui ne marque plus autant et des facteurs explicatifs
L'armada de Liverpool, le trio supersonic Mané-Firmino-Salah fait trembler toutes les défenses de Premier League depuis l'arrivée de Mohammed Salah à l'été 2018. L'approche offensive de Liverpool est dépendante des trois de devant qui sont tout d'abord à l'origine d'un gegenpressing théorisé par le coach allemand lui-même (le gengenpressing ou contre-pressing est la récupération très rapide du ballon une fois ce dernier perdu), mais aussi à la finition des actions qui prennent le plus souvent leurs source sur les côtés grâce aux latéraux qui montent très hauts. De ce fait, le trio Mané-Firmino-Salah est impliqué sur 24 des 37 buts inscrits en Premier League cette saison, et 29 si on compte ceux inscrits par Diogo Jota. Cette dépendance offensive du trio peut-être néfaste en cas d'une baisse de régime des trois de devant puisque personne d'autres ne marque dans l'équipe. L'approche offensive de Klopp est littéralement basée sur eux, ou du moins celle qui concerne la finition de l'action de but elle-même. Aucun milieu n'est incité à frapper de loin pour y pallier, aucun défenseur outre Van Djik ne marque de la tête. Alors, lorsqu'on voit que Liverpool n'a marqué qu'un but sur ses cinq derniers matches de championnat depuis leur victoire 7-0 à Palace, ça pose problème. Pire encore, Liverpool est actuellement sur une série de 87 tirs sans marquer en championnat ! Derrière eux, la pire série en cours en Premier League est de seulement 27 tirs, illustrant leur incapacité inexplicable à marquer depuis fin 2020.
Mais ce qui paraît inexplicable ne l'est en fait pas autant que ça. Non, ni Mané ni Salah et ni Firmino n'ont perdu leur football, il est important de prendre suffisamment de recul pour comprendre où est-ce que ça cloche. Loin de moi l'idée d'avoir la science infuse, si les Reds n'y arrivent plus depuis quelques matches ce n'est pas moi qui vous expliquera pourquoi de manière incontestable. La baisse de régime d'une équipe est commune à n'importe quel club, même les plus grands. La dimension psychologique peut-être un facteur explicatif. Enchaîner deux ou trois mauvais résultats par exemple peut faire remettre en question un entraîneur voire un attaquant : avant de reprendre la tête du championnat, Ole Gunnar Solskjær était par exemple sur la sellette lorsque Manchester United a fini 3ème de son groupe de Ligue des Champions et que l'équipe enchaînait les mauvaises prestations en PL, alors qu'aujourd'hui tout va mieux Aussi, on pourrait s'aventurer dans la théorie disant qu'une équipe qui domine son championnat s'essouffle après deux ou trois ans de domination car les clubs du championnat ont compris comment les Reds jouaient avec le temps (latéraux très haut, gengenpressing, Firmino en faux 9 qui vient chercher le ballon bas...)
Dans un sport où tout va très vite, où on remet en cause un club entier pour une seule défaite en championnat, il est évident qu'aujourd'hui la question se pose pour Liverpool. Les médias parlent de crise, c'est limite si certains remettent le travail de Klopp en question. Mais il est évident que Liverpool se relancera et peut toujours rêver d'un second titre d'affilé. A seulement 6 points de retard de Manchester United premier, les Reds devront tout de même faire face à nue équipe de Tottenham menée par José Mourinho très en forme dès le prochain match. Vaincu 2-1 à l'aller par une tête de Firmino à la 91ème, les Spurs voudront prendre leur revanche à Londres. Un match à suivre ce jeudi à 21h.
Axel